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L'étude des cultures par les anthropologues passe par un processus indispensable de recueil des faits ethnographiques, suivi d'une analyse savante de ces faits de sorte à déboucher soit sur des règles générales concernant le genre humain dans son ensemble, systèmes de parenté, fonction symbolique etc., soit sur des structures et des systèmes particuliers à une ethnie ou à un ensemble d'ethnies défini, systèmes et structures commandant la reproduction de la culture. Les faits ethnographiques sont donc bien la base indispensable de tout travail anthropologique et ethnologique. Or ce sont ceux qui sont les plus vulnérables à l'ouverture des cultures les unes aux autres dans le développement économique, a fortiori dans la globalisation.

Le recueil de ces fait ethnographiques, leur comparaison avec des données plus anciennes lorsqu'elles existent, restent pour la partie du monde qui nous intéresse une tâche encore immense à accomplir que le petit nombre d'ethnologues et d'anthropologues à l'œuvre aujourd'hui ne permet d'espérer mener à bien. Du temps que de nouvelles générations de chercheurs se forment à ces tâches très spécialisées, que vont devenir les données ethnographiques telles qu'elles existent à ce jour ? Elles vont en partie disparaître, en partie ne plus être comprises dans un environnement physique et humain qui aura changé.

Or les progrès de l'informatique nous permettent en revanche dès aujourd'hui de geler en quelques sortes ces données ethnographiques dans leur contexte en les rassemblant dans une même banque de données et d'attendre la venue des chercheurs compétents pour les exploiter. L'informatique peut préserver l'essentiel d'un rituel, comme d'un costume ou d'une architecture. Il suffit de recueillir ces données de manière rigoureuse et de les organiser selon un ordre accessible à tous, utilisateurs non informés aussi bien que spécialistes.
La fin du 2e millénaire aura donc vu la naissance des banques informatiques dont l'importance apparaîtra de plus en plus indispensable à la préservation du patrimoine, et au moins aussi vitale pour l'avenir de l'humanité que celle, disons, des banques de sperme.

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La pluralité de groupes ethniques dans Chine du Sud et la Péninsule Indochinoise

Avec plus d'une centaine de peuples minoritaires en plus des majorités chinoise, vietnamienne, thaïe ou birmane, la Chine du Sud et son prolongement dans la péninsule indochinoise étaient jusqu'à présent un véritable sanctuaire des cultures traditionnelles, un trésor du patrimoine mondial que le monde moderne risque d'effacer rapidement et dont la disparition appauvrira encore notre planète déjà bien malmenée. Nous ne pourrons plus en écrire l'histoire, ni en pronostiquer l'avenir, une fois que les structures de ces sociétés auront été soit détruites soit enfouies au plus profond de l'inconscient des peuples. Pire, l'éradication involontaire de ces cultures par la modernisation, introduira inévitablement des traumatismes générateurs de graves dysfonctionnements dans la construction d'un avenir prospère et pacifique de ces populations.

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La spécificité de chaque groupe

Ces ethnies minoritaires se regroupent en cinq familles linguistiques :
- taï-kadaï,
- austroasiatique, principalement mon-khmer,
- austronésiens,
- tibéto-birmans,
- miao-yao

Elles se répartissent largement par dessus les frontières, ce qui souligne l'intérêt de les étudier dans leur ensemble plutôt que par fraction dans chaque pays concerné.

Pour les caractériser brièvement et d'une manière générale, les taï-kadaï et singulièrement les diverses ethnies taï, constituent un ensemble de sociétés paysannes ayant souvent formé des Etats (seigneuries ou royaumes) indépendants avant d'être incorporées selon divers degrés de dépendance et d'assimilation dans le domaine des Cours de Chine, d'Annam, de Birmanie, du Laos ou de la Thaïlande, ces deux derniers pays de population taï majoritaire. Elles se sont admirablement prêté à une relation de vassalité avec les puissances du moment tandis qu'elles-mêmes imposaient leur domination et leur tribut aux populations austroasiatiques voisines, souvent aborigènes, accueillant à la périphérie montagnarde de leur territoire les sociétés tribales migrantes des tibéto-birmans et des miao-yao.

Elles perpétuent encore aujourd'hui une civilisation communautaire et hiérarchique dominée par le rapport à la propriété ou à l'usufruit de la terre. Elles sont en général ancrées dans un territoire auquel elles s'accrochent obstinément comme la plupart des sociétés paysannes dans le monde.

Les austroasiatiques que les linguistes répartissent en deux groupes : palaunguique et mon-khmer, se présentent souvent comme les premiers occupants du sol, en partie assimilés, en partie réfugiés à la périphérie des formations étatiques taï. Ils entretiennent avec ces dernières des relations pouvant varier du simple tribut au servage périodique. Ils évoquent l'existence ancienne de chefferies importantes aujourd'hui disparues, à l'exception de la seigneurie palaung de Tawngpeng et des chefferies wa des Wa States de Myanma (Birmanie). Seuls les Mon et les Khmer ont fondé des royaumes de grande envergure attestés par des vestiges archéologiques. Tous les autres vivent aujourd'hui en communautés paysannes peu structurées, souvent bouddhistes et tributaires culturellement et économiquement des sociétés taï voisines.

Les austronésiens sont les représentants vestigiels dans la péninsule indochinoise et dans l'île de Taïwan des peuples insulindiens. Au cours de l'histoire, seuls les Cham ont eu un royaume important attesté par de brillant vestiges archéologiques : le Champa, avant d'être en grande partie assimilés ou chassés vers le Cambodge par la poussée vietnamienne vers le sud.

Pour la plupart originaires des marches du Tibet et des provinces chinoises voisines du Sichuan et du Yunnan, les tibéto-birmans ont suivi un axe migratoire nordàsud qui les a amenés au nord-ouest du Viêt-nam, au nord du Laos et au nord de la Thaïlande. Ils vivent en villages de haute montagne et pratiquent l'agriculture itinérante sur brûlis. Ce sont des sociétés tribales fondées sur des relations de parenté qui prévalent sur les rapports économiques. Animistes influencés par les religions tibétaines, une fraction d'entre eux a été convertie au christianisme anglo-saxon, une fraction encore plus faible au catholicisme par les Pères de Bétharam.

Les miao-yao représentent aujourd'hui ce qui reste des populations aborigènes du nord et du centre de la Chine avant la constitution et l'expansion de l'ethnie Han. Un grand nombre d'entre elles furent assimilées, les autres retraitèrent progressivement au cours des siècles vers le sud. On les trouve, en Chine, depuis le sud du Hubei jusqu'aux frontières méridionales. Les Miao dominent au Guizhou où toutes leurs ethnies sont représentées. L'une d'entre elles, les Hmong, a suivi un axe Nord à Sud puis Est àOuest pour s'insérer dans toutes les montagnes du Nord-Vietnam, du Nord Laos et du nord de la Thaïlande.

Les Yao ont suivi de leur côté une tendance générale Nord-Est -à Sud-Ouest voire Nord à Sud, Est à Ouest, débordé sur tout le Viêt-nam nord, le nord-Laos et la Thaïlande du nord. Sociétés tribales, sédentarisées et en transition vers la paysannerie en Chine ou encore nomades, se livrant à l'agriculture sur brûlis, dans la péninsule, leurs communautés ont conservé le modèle égalitaire où les relations de parenté prédominent sur tout rapport économique. Tandis qu'une fraction des Hmong a été convertie au christianisme anglo-saxon, une autre au catholicisme par les pères des Missions Etrangères, les Oblats de Marie, etc., la grande majorité est restée animiste. Les Yao ont davantage résisté au zèle missionnaire parce qu'ils sont déjà au centre d'un des grands courants rédemptoristes du Taoïsme méridional : l'école de Meishan.

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Le potentiel de recherche

Si on connaît ces populations dans les grandes lignes, elles n'ont commencé à être étudiées par endroits tant en Chine du Sud que dans la Péninsule qu'à compter des années 1950 et 1960. La révolution culturelle en Chine, la guerre au Viêt-nam et au Laos, l'insécurité et la fermeture de la Birmanie ont largement handicapé les progrès de la recherche, si bien que de nombreux groupes n'ont encore jamais été étudiés. Dans chaque pays, des considérations politiques ont conduit à la reconnaissance de certains au détriment d'autres si bien que, s'ils n'ont pas une élite articulée capable de représenter leurs intérêts dans les instances politiques, l'ignorance et l'improvisation caractérisent le plus souvent les décisions prises à leur égard.

On peut affirmer sans exagérer que la préservation de leur patrimoine culturel est laissée à leur entière responsabilité quelles que soient les épreuves qui les attendent. C'est là que des mesures conservatrices comme la création de Banques de données nationales, paraissent s'imposer comme une priorité absolue. Ces banques auront mission, tout en regroupant toutes les données déjà connues, de s'assurer que l'ensemble du terrain a été systématiquement couvert et que nulle population n'a été oubliée.

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Autres recherches particulières du CACSPI

Tout en se donnant pour cadre la création progressive de banques de données ethnographiques dans les divers pays concernés, le CACSPI entend favoriser des interventions spécifiques pour la préservation de patrimoines particuliers auxquelles l'un ou l'autre de ses chercheurs pourra s'associer. A l'heure actuelle Haether Peters et David Feingold ont engagé dans la province du Yunnan en Chine un programme d'aménagement d'un tourisme viable pour l'environement et les cultures traditionnelles à partir de Lijiang . Heather Peters participe comme consultante de l'UNESCO à la survie culturelle de Louang Phrabang, ville classée au patriloine mondial, en revitalisant les arts et les techniques traditionnelles de construction des pagodes et monastères en liaison avec la communauté monastique.

William Lang Dessaint et Avonado Ngwâma, spécialistes des Lissou des confins du Yunnan, du Myanma et de la Thaïlande qui sont traditionnellement un peuple sans écriture, ont découvert des manuscrits à l'usage des chamanes et espèrent pouvoir se rendre rapidement sur le terrain pour commencer le déchiffrement de ces manuscrits qui promettent d'être de la plus haute importance pour l'ethnologie de cette région.

Stéphane Gros a formé un Projet de création d'un Centre d'information et de recherche, basé à Gongshan, Yunnan. Ce Centre aura pour but de promouvoir la recherche en botanique, ethnobotanique et ethnologie dans cette région, à travers la mise en relation d'institutions et de chercheurs chinois et étrangers.

Emmanuel Guillon, spécialiste des Môn du Myanma et de la Thaïlande, professeur de langue môn à l'I.N.A.L.C.O., entend contribuer à la sauvegarde et à l'étude des milliers de manuscrits en môn ancien retrouvés récemment en Thaïlande

Le CACSPI entend s'employer à chercher des financements appropriés pour ces divers projets plus particuliers tout en fournissant aux chercheurs une structure d'accueil scientifique.

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